Aménorrhées, acupuncture et neuro-modulation hypothalamo-hypophysaire : traitement de 25 femmes aménorrhéiques par acupuncture. Hypothèses neuro-physiologiques

Résumé : Une expérience de traitement de l’aménorrhée secondaire par acupuncture a été réalisée sur 25 patientes âgées de 17 à 35 ans. Globalement, 56 % de bons résultats (14 cas) ont été obtenus. L’efficacité du traitement par acupuncture dépend de l’origine de la pathologie et des antécédents personnels des patientes. Six facteurs déterminants pour la réussite du traitement par acupuncture ont été identifiés : 1/ l’origine hypotalamique de l’aménorrhée, 2/ l'absence d'antécédents d'anorexie mentale, 3/ la faible ou moyenne importance du désordre hypothalamo-hypophysaire, 4/ l'existence d'un facteur "stress", 5/ la rééquilibration neuro-végétative et 6/ la rééquilibration énergétique. Ainsi, ces résultats montrent que l'acupuncture est un traitement de choix pour la restauration de la fonction ovulatoire. Par ailleurs, du fait de sa parfaite innocuité, l'acupuncture devrait être utilisée systématiquement en première intention dans le traitement de tous les troubles fonctionnels neuro-hypophysaires. Dans cette étude, on observe que l’acupuncture permet la guérison de l’aménorrhée normoprolatinémique par la régulation de l’activité du système nerveux autonome. L’analyse de ces résultats, à la lumière des récentes recherches en électroacupuncture expérimentale, révèle l’existence potentielle de phénomènes impliquant d'étroites relations neuro-neuroniques, liés notamment à l’effet du stress sur l’activité hypothalamique et hypophysaire. Mots-clés : acupuncture –aménorrhée – électroacupuncture expérimentale – naloxone – prolactine – système nerveux autonome.

 

Introduction

Les résultats décevants des traitements médicamenteux et l’ouverture d'esprit ont conduit le Pr. Jean-Pierre Bercovici à ouvrir son service hospitalier d'Endocrinologie du CHU de Brest à l'acupuncture afin de traiter des femmes présentant une aménorrhée secondaire. Nous présentons les résultats de cette étude parue en 1984 à la lumière des récentes recherches en électroacupuncture expérimentale dans cette pathologie, d’autant plus qu’actuellement seulement deux ECR ont été réalisées sur cette pathologie précisément [10,28].

 

 

Précis d’acupuncture en obstétrique

Précis d’acupuncture en obstétrique

ROQUERE Hélène et LAFONT Jean-Louis

Montpellier : Sauramps Médical, 2016.

-451 p. ; 24 cm x 17,5 cm. Broché, illustrations, biblio.

 ISBN 979-1030300444 : 59€

 

 Personnalités éminentes de l’Association Française pour l’Étude et la Recherche en Acupuncture (AFERA), Hélène Roquère et Jean-Louis Lafont nous livrent dans cet ouvrage la synthèse de leurs expériences, somme des activités professionnelles en tant que médecin acupuncteur spécialisé en obstétrique ou enseignant ou ex-enseignant au sein du diplôme interuniversitaire (DIU) d’acupuncture obstétricale de Nîmes-Montpellier. Ainsi au cours du congrès de l’AFERA 2014, Hélène Roquère présentait de façon très didactique la dynamique de l’accouchement ; de même, Jean-Louis Lafont insistait sur les points de traitement de l’infertilité chez la femme, en particulier sur la stimulation, lors de la première partie du cycle menstruel, du point FO11 yinlian 陰廉 [1]. Ce point mentionné pour la première fois dans le Zhenjiu jiayijing (針灸甲乙經, L’ABC d'Acupuncture et de Moxibustion) écrit par Huang Fumi en 259 de notre ère a la stérilité pour seule indication. En effet, il permet de faire circuler le qi du Foie et d’en mobiliser le Sang.

Hélène Roquère et Jean-Louis Lafont abordent donc dans leur livre la surveillance de la grossesse, la pathologie de la grossesse (vomissements, insomnie, anémie, dépression, menaces d’accouchement prématuré, syndrome du canal carpien, prurit gravidique, etc.), l’accouchement (présentations dystociques, versions, inductions du travail, etc.), mais aussi toutes les pathologies du post-partum (rétention des lochies, incontinence urinaire, hémorroïdes, douleurs du périnée, endométrite, constipation, etc.). Un chapitre complet est consacré à l’allaitement avec l’hypogalactie, les crevasses, l’engorgement, les abcès... et un autre à l’infertilité.  Pour la thérapeutique, les auteurs ont insisté sur la différenciation des syndromes (bianzheng), classés selon plusieurs modalités : suivant les huit principes (yin yang, froid chaleur, biao li, xu shi), suivant les méridiens et les luo, les substances vitales (affections du qixue - vide, stagnation de Sang, les glaires, etc.), et enfin suivant les zang fu insuffisance ou excès (exemple : Vide de Sang du Foie ou Vide de qi du Poumon et du Rein). Bref un ouvrage assez complet qui malheureusement fait l’impasse sur la médecine fondée sur le niveau de preuve. Aucun essai comparatif randomisé n’est cité alors que deux-cent-trente-sept ECR et méta-analyses sont référencés à ce jour sur la base de donnée américaine Medline Pubmed [2] et que l’évaluation de l’acupuncture en obstétrique avance à grands pas [3]. De même, les auteurs ont essayé de clarifier la notion de points interdits à partir des Classiques Chinois (Compendium d'Acupuncture et Moxibustion » Zhenjiu dacheng, le « Classique illustré des points d’acupuncture de l’homme de bronze » Tongren shuxue zhenjiu tujing, etc.). Mais sans doute la revue systématique de Carr (823 femmes bénéficiant de 4549 à 7234 traitements d'acupuncture sur un ou plusieurs points interdits) [4] et la grande étude observationnelle allemande (n=5885 femmes avec acupuncture sur les points interdits à tous les stades de la grossesse) sont bien plus parlantes. Les taux de fausse couche, de rupture prématurée des membranes, de travail prématuré ou menace de travail prématuré sont comparables à ceux des femmes enceintes non traitées et/ou compatibles avec l’incidence prévue [5].

On regrettera aussi que le chapitre accouchement soit très succinct et n’aborde pas l’analgésie lors du travail alors que l’acupuncture et/ou l’électroacupuncture durant l’accouchement peuvent être raisonnablement indiquées avec un grade B (présomption scientifique) selon le niveau des recommandations de la Haute Autorité de Santé Française [6].

Quoi qu’il en soit, Hélène Roquère et Jean-Louis Lafont nous montrent de façon didactique et de manière très structurée la richesse de l’acupuncture et toutes ses possibilités thérapeutiques. Ce livre se doit de faire partie de la bibliothèque idéale de tout étudiant de DIU d’acupuncture obstétricale ou de tout médecin s’intéressant à l’obstétrique.

Dr Jean-Marc Stéphan

Directeur de la revue « Acupuncture & Moxibustion »

Coordinateur du DIU d’acupuncture obstétricale à la Faculté de Médecine de Lille 2

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Conflit d’intérêts : aucun

 Références

 [1]. Covin J. Le XXIIIe Congrès d’acupuncture de l’AFERA. Acupuncture & Moxibustion. 2014;13(2):144-145.

[2]. Pubmed Medline. [Consulté le 16 juin 2016]. Available from http : http://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed

[3]. Stéphan JM. Obstétrique et acupuncture factuelle. Quel niveau de preuve en 2015 ? Acupuncture & Moxibustion. 2015;14(4):285-291.

[4]. Carr DJ. The safety of obstetric acupuncture: forbidden points revisited. Acupunct Med. 2015 Oct;33(5):413-9.

[5]. Romer A, Zieger W, Melchert F [Prohibition of acupuncture points during pregnancy—an outdated tradition or objective evidence?]. Deutsche Zeitschrift Für Akupunktur 2013;56:10–13.

[6]. Stéphan JM. L'acupuncture autour de la naissance : analgésie durant l'accouchement. Acupuncture & Moxibustion. 2010;9(1):28-33. 

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