2) CARACTERISTIQUES D'UN RYTHME BIOLOGIQUE
Les rythmes biologiques ont
une origine génétique, mise en évidence chez les mouches Drosophiles par Konopka
et collaborateurs (62) et l'équipe de Bargiello (5). Ainsi, le chromosome X est
porteur d'un gène "per" qui contrôle la longueur de la période activité-repos et
celle de la ponte. Il existe aussi un
gène "clock" qui contrôle la phase de certains rythmes. Par ailleurs,
Reinberg et collaborateurs ont constaté que les rythmes circadiens de
l'excrétion urinaire des 17-hydroxycorticostéroïdes avaient davantage de
caractéristiques communes chez des jumeaux monozygotes qu'entre des jumeaux
dizygotes (93).
Les noyaux
suprachiasmatiques (NSC), formation hypothalamique bilatérale située près du
chiasma optique, sont une des horloges biologiques ou oscillateurs, responsables
de certains rythmes circardiens, en particulier ceux des sécrétions de l'ACTH,
de la prolactine, et du comportement de la faim et de la soif, mais aussi le
rythme éveil-sommeil (94,65). Moore a ainsi démontré que la destruction des NSC
entraînait la disparition plus ou moins totale de ces rythmes. A noter que les
sécrétions persistent, mais sans variation temporelle
(76).
D'autres oscillateurs
semblent exister, comme l'atteste la persistance de l'activité circadienne
corticosurrénalienne du rat, et cela, malgré l'abolition du rythme de l'ACTH par
destruction du NSC (109). La glande pinéale (épiphyse), autre oscillateur des
rythmes circadiens régulée par l'intensité lumineuse, secrète la mélatonine,
responsable de la régulation de l'axe hypothalamo-hypophysaire au cours du
nycthémère (104,119).
Une équipe strasbourgeoise a
démontré d'ailleurs le rôle d'un gène baptisé CREM dont la surexpression
nocturne entraîne une puissante répression de la transcription génique AMPc
dépendante, d'où éventuelle interruption ou ralentissement des métabolismes
neuro-endocriniens liés à l'épiphyse et aux noyaux suprachiasmatiques
(58).
Enfin chez l'homme, il a été
démontré que des oscillateurs corticaux gouvernent vraisemblablement les rythmes
circadiens des activités complexes (35).
Ces horloges biologiques sont elles-mêmes sous le contrôle des synchroniseurs (50). Un synchroniseur est un ou plusieurs facteurs de l'environnement capables de régler les oscillateurs et la période des rythmes circadiens. Cela peut correspondre à l'alternance du jour et de la nuit, mais aussi à celle des saisons. Notons cependant que la suppression des synchroniseurs, comme cela a été fait dans les expériences d'isolement en grotte souterraine (101,102,3), laisse persister les rythmes circadiens, mais avec généralement une période naturelle allongée à 25 heures environ chez l'homme sain (10,94).
3)
CHRONOPATHOLOGIE
La chronopathologie est
l'étude des variations périodiques d'une maladie, et des altérations
persistantes de la structure temporelle, qu'elles soient résultat ou cause du
processus pathologique (94).
Depuis bien longtemps, les
médecins savent qu'une crise ulcéreuse digestive, selon son horaire, sera soit
d'origine gastrique, soit d'origine duodénale. La crise de goutte disparaît
toujours au chant du coq. Le dérouillage et la douleur matinale sont typiques de
la polyarthrite rhumatoïde.
D'autre part, à côté de ces
rythmes circadiens, on connaît aussi les rythmes annuels: les dépressions
saisonnières, les épidémies de grippe hivernale, les rhinites allergiques du
printemps ou de l'été ...
Ainsi, la chronopathologie
est étudiée actuellement dans tous les domaines de la
médecine.