A) Appareil cardio-vasculaire
1/ Rythmes
circadiens
* L'hypertension
artérielle
L'acrophase des pressions
systolique et diastolique se situe respectivement à 18 et 22 heures. Les
pressions sont à leur bathyphase durant le sommeil, puis s'elèvent
progressivement juste avant le réveil, de même les sécrétions de catécholamines
et la fréquence cardiaque. L'acrophase de sécrétions de catécholamines se situe
vers midi; celle de la fréquence cardiaque entre midi et 16 heures. Chez
l'hypertendu, tous ces rythmes circadiens persistent (94).
* L'infarctus du
myocarde
Dans une étude portant sur
2999 patients hospitalisés pour infarctus du myocarde en phase aiguë, Muller a
mis en évidence un pic de survenue entre 6 heures et midi, la fréquence la plus
élevée étant retrouvée à 9 heures. La fréquence de survenue de l'infarctus est
de 1,26 fois plus élevée dans la période de 6 heures à midi que la moyenne des
fréquences des trois autres tranches horaires (79).
Toujours
selon l'équipe de Muller, il existe un 2ème pic de fréquence,moins important
entre 19 heures et 20 heures.
Pour Hjalmarson, 28% des
infarctus ont un pic de fréquence entre 6 heures et midi. Le 2ème pic de
fréquence (25% des infarctus) entre 18 et 24 heures (54).
Une troisième équipe a également mis en évidence une nette augmentation
de la fréquence de survenue de l'infarctus entre 6 heures et midi, fréquence
multipliée par 1,8 par rapport à la fréquence moyenne des 3 autres tranches de 6
heures (121). A noter que la prise de bêta-bloquants supprime ou modifie le
rythme circadien de l'infarctus (79,121,54).
*
L'angor
Nademanee a constaté sur les
holters des 24 heures de 68 patients ayant un angor chronique stable, un pic de
fréquence des épisodes ischémiques cliniques et silencieux entre 8 heures et 15
heures (81).
Rocco, dans une étude
portant sur 32 patients ayant un angor chronique stable, 39% des épisodes de
sous-décalage du segment ST sont survenus entre 6 heures et midi sans qu'il y
ait augmentation de la fréquence cardiaque ou de l'activité physique
(96).
L'angor de Prinzmétal évalué
chez 13 patients sur Holter de 48 heures montre un sus-décalage de ST très
nettement prédominant entre 0 heure et 8 heures (114).
Yasue a évalué 13 patients
ayant un angor de Prinzmétal par épreuve d'effort le matin entre 5 heures et 8
heures, puis dans l'après-midi du même jour de 15 à 16 heures. Ces auteurs ont
induit une crise angineuse avec sus-décalage de ST, le matin, chez tous les
patients. Deux patients seulement ont eu une crise dans l'après-midi
(123).
* Les morts
subites
Une prédominance matinale
des arrêts cardiaques a également été notée par l'équipe de Muller. En effet,
l'étude de l'heure de décès des 2203 patients de l'Etat du Massachusetts, morts
subitement par arrêt cardiaque en 1983 objective un pic de fréquence entre 7
heures et Il heures, avec un second pic moins important entre 17 heures et 18
heures (78).
Willich, dans une étude
prospective portant sur une cohorte de 5209 sujets suivis pendant 38 ans a
enregistré 33% de morts subites entre 6 heures et 12 heures. En outre, le risque
horaire de mort subite entre 7 heures et 9 heures est d'au moins 70% plus
important que pour les autres 22 heures de la journée
(120).
Plus récemment, 1423 arrêts
cardiaques ont été analysés par l'équipe de Levine à Houston entre le 1er
décembre 1989 et le 30 novembre 1990. L'existence d'un rythme circadien a été
démontré de façon très significative (p<O,OOOl). Il existe un minimum aux
environs de 3 heures du matin, puis le rythme des décès s'accélère très
rapidement à partir de 6 heures et passe par un pic aux environs de midi. La
fréquence des décès diminue alors très progressivement entre midi et 2 heures du
matin (69).
*
Arythmies
Cugini a mis en évidence un
pic de fréquence de survenue des arythmies supra-ventriculaires graves à type de
flutter ou fibrillation auriculaire, entre 8 heures et 11 heures chez 87 patients
(24).
En conclusion, toutes ces
études suggèrent qu'il existe un rythme circadien des pathologies
cardio-vasculaires avec une acrophase entre 6 heures du matin et midi. Divers
mécanismes déclenchants matinaux ont été mis en évidence. Ainsi le pic de
sécrétion matinal des catécholamines (adrénaline et noradrénaline) (118, 94),
l'élévation de la pression artérielle et de la fréquence cardiaque qui
accroissent les besoins myocardiques en oxygène (73), et enfin l'hyperagrégation
plaquettaire au cours de la matinée (111,87) avec à l'opposé une activité
fibrinolytique du sang diminuée (98,2) sont les principaux événements
responsables de ces pathologies. Ces différents processus ayant une intensité
accentuée le matin, expliqueraient l'évolution de la plaque d'athérome vers la
formation d'un thrombus occlusif (infarctus, mort subite, accidents vasculaires
cérébraux) ou non (angor instable) (79,26). Les thérapeutiques doivent prendre
en considération cette période matinale de vulnérabilité et l'heure
d'administration du médicament doit être étudiée. A cet égard, un bêta-bloquant
d'action prolongée pris au coucher, ou un bêta-bloquant d'action rapide pris le
matin, aura une meilleure efficacité (86,94).
2/ Rythme
circannuel
* Thromboses coronaires et
cérébrales
La mortalité par infarctus
du myocarde ou par accident vasculaire cérébral, en rapport avec une thrombose
ou une embolie, suit un rythme circannuel avec une acrophase en hiver (janvier,
février). Les auteurs expliquent ce fait par l'augmentation de la viscosité
sanguine, des hématies et des plaquettes associée à une baisse du taux
d'antithrombine III au cours de l'exposition au froid de l'hiver
(60).
Entrican observe également
que les artériopathies coronariennes et cérébrales sont beaucoup plus fréquentes
en décembre et janvier (30). D'autres travaux (28,88) arrivent aux mêmes
conclusions : les maladies cardio-vasculaires, en particulier les
infarcissements myocardiques, ont une incidence surtout accrue durant les mois
hivernaux de janvier et février.
* Embolies
périphériques
C'est toujours en hiver qu'une acrophase a été objectivée pour les embolies périphériques, en particulier dans les artères fémorales (20). En ce qui concerne les thrombo-embolies veineuses, un rythme saisonnier avec un pic en décembre, janvier, et, une bathyphase en juillet, août, a été aussi observé (30).