MÉRIDIENS, 1999 - N°
112
ÉDITORIAL
Avec ce
numéro du premier semestre 1999 apparaît une nouvelle rubrique au
Sommaire. Intitulée "cheminements en acupuncture", elle est destinée
à recevoir les témoignages de ceux qui virent leur orientation professionnelle
totalement modifée par la rencontre de 1' Acupuncture-moxibustion. Jean Borsarello l'inaugure
avec un récit savoureux de sa découverte de cette médecine en Indochine " en juin
1955. C'est le premier volet d'une suite de notes autobiographiques que nous donnera
l'auteur. Auguste Nguyen l'accompagne,
en nous offrant au fil de pages passionnées, une réflexion de
synthèse
qui vient couronner une brillante carrière .
- La rubrique " études
cliniques" est occupée par trois articles.
Deux
sont signés par Monique Mingham-Gourhant. Ils prolongent ses
communications sur les lombalgies et la cicatrisation qui connurent un
franc succès à la réunion annuelle de l'EFA en mars dernier. Ils intéresseront tout
particulièrement les confrères qui
pratiquent la médecine physique.
Le
troisième est de Nadia Volf et Heidi Thorer dont l'ingéniosité et la bonne
humeur
ne
sont pas en reste pour nous expliquer comment traiter l'ivresse.
Les
trois sont attendues en mars 2000 à la prochaine " réunion du Procope'' .
-
Le "mouvement scientifique" est enrichi par deux contributions
consacrées à
l'évaluation
de l'Acupuncture.
Johan
Nguyen, résumant l'excellent séminaire qu'il organisa avec le GERA en juin
dernier à
Aix-en-Provence, nous invite à participer avec confiance et détermination à
l'évaluation de
notre discipline et en particulier à une lecture critique de la
littérature. Son
dessein est d' autant plus méritoire que de nombreuses études
anglo-saxonnes testent avec une bonne méthodologie de mauvaises hypothèses
alors que les études chinoises,
qui testent de bonnes hypothèses, pèchent souvent par une mauvaise
méthodologie.
Patrick
Triadou s'interroge de son côté sur les meilleures procédures à mettre en
oeuvre pour
soumettre l'acupuncture à l'expertise scientifique. Il est possible, nous
dit-il, de
juger des effets
globaux de cette méthode thérapeutique en la considérant comme une boîte noire. Mais cela
oblige à un rapprochement délicat des nosologies chinoises traditionnelles et
scientifiques contemporaines et à l'adoption d'un modèle standard qui ne peut plus prendre
en compte l'histoire du malade ni les signes de sa réactivité individuelle. On perçoit
alors l'utilité pour l'évaluation de ces collections de Syndromes
( zheng), centrés sur les
organes-fonctions, dont ils précisent l'atteinte selon
la physiopathologie traditionnelle.
-
Deux essais occupent la rubrique "études traditionnelles" .
Le
premier est du à Robert Hawawini qui présente une revue très complète des
combinaisons
thérapeutiques fondées sur les points assentiments, shu du dos.
Ce
travail pourrait sans doute donner lieu, de la part de l'auteur, à d'autres
développements encore. La seconde est un inédit du Professeur Zhang Ji sur
la sémiologie des Méridiens Principaux. Membre du comité de rédaction des
manuels à l'usage des universités de médecine traditionnelle chinoise, Zhang
Ji est conscient que le système actuel d'enseignement de l'
Acupuncture-moxibustion est plus centré sur la théorie des organes-entrailles que
sur celle des méridiens. Or l'efficacité de l'Acupuncture dépend avant tout d'une
connaissance approfondie de la physiologie énergétique de ces derniers ainsi que de celle
des points. Il propose donc de recentrer la perspective sur la théorie des
Méridiens en insistant sur les singularités des trajets d'énergie et en présentant de façon
systématique les symptômes qui leur sont rapportés dans la littérature ancienne . Nous
verrons au fur et à mesure de sa publication que ce travail conduit
à un approfondissement du Nei Jing et à une
pratique plus créative des aiguilles et
des moxas (non abordée ici).
Signalons
que ce texte intègre des données encore peu connues dans notre pays,
comme
la signification qu'il convient désormais d'attribuer, depuis les découvertes
de
Ma Wang-dui (1973) aux locutions ''shi dong bing''
et ''suo sheng bing'',
attachées
depuis les temps les plus anciens à la description des Méridiens(1).
Enfin la
traduction annotée est due à un groupe de médecins acupuncteurs français. C'est la première fois
semble t-il, qu'un tel groupe travaille directement sur les textes classiques, dans une
optique clinique, avec un universitaire chinois, reconnu comme
un expert dans son propre pays.
Ce
numéro 112 reflète donc assez largement les grands courants qui traversent
actuellement l'acupuncture française et qui s'exprimeront à
Paris les 11 et 12 décembre prochains
lors du 3ème Congrès de la FAFORMEC .
''Méridiens""
manifeste ainsi son soutien à une entreprise qui vise à mettre en
commun
des énergies qui sans cela resteraient désespérément dispersées.
Notre
revue devrait en outre ouvrir bientôt ses colonnes à d'autres aspects
de
la tradition médicale chinoise ; notamment aux techniques de " Qi
Gon"'
qui
peuvent être associées à l'art de guérir. Certaines d'entre elles véhiculent
de
véritables trésors de la sagesse orientale. Simplicité, spontanéité et
efficacité
restent comme toujours les critères d"authenticité de ce Savoir-faire
(gongfu).
Ils nous rappellent cette belle phrase de Savinien De Cyrano
Bergerac
que "dans les Sciences il y a un vrai, hors lequel on est toujours
éloigné
du facile"(2)
Jean-Claude Dubois
(l)-cf. sur ce point
notre communication : "à propos de la sémiologie des méridiens"
actes. du
2ème congrès national
de la Faformec, Nîmes 1998
(2) - Les Oeuvres
diverses de Monsieur De Cyrano Bergerac, fragment d'histoire comique contenant
les États et Empires
du Soleil.