MÉRIDIENS, 2000 - N° 115
FIBROMYALGIE , MEDECINE OCCIDENTALE ET ACUPUNCTURE
par le
Docteur Gilles Steenkiste
Résumé: La connaissance de cette
entité encore mystérieuse qu'est la fibromyalgie est fragmentaire et l'absence
de consensus entre les diverses spécialités médicales concernées par son étude
ne fait qu'accroître la difficulté d'en trouver une définition. Il s'agit alors
plutôt d'un diagnostic d'exclusion, reposant sur un faisceau plus ou moins
certain d'arguments.
Citons parmi les plus
importants:
.L'existence de points
douloureux à la palpitation (18 zones sensibles, 11 nécessaires au diagnostic).
Une fatigue musculaire extrême, confinant le malade dans une sphère d'activité
de plus en plus réduite
Il n'est pas, de ce fait,
déplacé de parler de "maladie orpheline", car elle a jusqu'alors très peu
mobilisé les laboratoires de recherches pharmaceutiques, qui ne l'étudient
guère, vu sa prétendue rareté. Mais peut on encore considérer rare une maladie
touchant plus de 2% de la population mondiale, officiellement reconnue par l'OMS
et aux conséquences invalidantes, tant morales, physiques, que sociales et
financières? La multiplicité des hypothèses étiologiques (dont aucune ne semble
pleinement satisfaisante) est bien corrélée par la difficulté d'établir une
stratégie thérapeutique:
La médecine chinoise, par
son abord "énergétique" de cette maladie, qui se présente comme une "crise de
l'énergie" et une atteinte massive des capacités de mouvement de l'individu,
pourrait bien fournir une voie de recherche active et productive, répondant
par des concepts simples à ce défi que lance la fibromyalgie à la société et aux
limites du savoir.
Mots-clés: fibromyalgie, syndrome
polyalgique idiopathique diffus, SPID., FMS tiggerpoints, acupuncture,
prise en charge multidisciplinaire.
Abstract
:
Knowledge of fibromyalgia, something that is still mysterious, is fragmentary
and the lack of agreement between the medical specialists involved in its study
only increases the difficulty in finding a definition for it. As a result it is
rather a question of a exognosis, based on a more or less certain group of
arguments. Among the more important of these we may
mention:
Consequently
it is not inappropriate to speak of an "orphan illness" because until nom it had
very little interest for the pharmatical research laboratories which carry out
hardly any research into this problem, as they consider it so rare. But can an
illness that afflicts more than 2% of the world's population, is officially
recognised by the WHO and causes incapacities that are not only moral and
physical but also social and financial, be considered rare? The large number of
etiological hypotheses, none of which appears satisfactory, is well correlated
by the difficulty of establishing a strategy of therapy :
By
its "energy" approach to this illness, which appears as a "crisis of energy" and
a massive attack on a individual's ability to move, Chinese Medicine could well
provide an avenue of active and productive research, responding by simple
concepts to this challenge that fibromyalgia has presented to society and
the edge of knowledge.
Keywords
: fibromyalgia,
diffuse polyalgic idiopathic syndrome, SPID, FMS tiggerpoints, acupuncture,
multidisciplinary financial cover.
La fibromyalgie, que l'on rapproche souvent du syndrome de fatigue (ou d'épuisement) chronique, est loin de faire l'objet d'un consensus des différentes spécialités médicales qui s'y trouvent confrontées, certaines concluant au trouble psychique, d'autres à une hypersensibilité douloureuse, d'autres encore à une simulation revendicatrice d'invalidité.
Cependant, comme le disait
une patiente: "Et si le fait de se traîner lamentablement était une vraie
pathologie ?" On parle aussi à son sujet de maladie "orpheline" c'est à dire
rare, touchant, si l'on s'en tient à cette définition, moins de 1 personne
sur 20000, motivant peu de recherche car peu rentable sur le plan des retombées
commerciales. Mais peut on encore parler de maladie rare devant un syndrome dont
la prévalence dépasse 2 % de la population mondiale? Il nous a paru opportun de
faire le point sur cette maladie car sa fréquence est en augmentation constante.
Etrange histoire que celle de cette maladie "invisible", reconnue par l'OMS en
1992.
Étymologiquement, son nom se
réfère aux douleurs musculaires et aux fibres qui les composent. Il ne s'agit
pas cependant d'un nouveau syndrome, car il a été décrit la première fois par
William Balfour, un chirurgien de l'Université d'Edimbourg, en
1816...
Pendant de nombreuses années
la Médecine lui a donné des noms divers, tels que: myalgie rhumatismale,
syndrome du point de pression, fibrosite chronique, polyenthésopathie...quand il
n'était pas tout simplement considéré comme une forme plus psychiatrique de
somatisation ou d'hystérie.
Les Anglo-saxons, qui parlent plus volontiers de SPID (ou syndrome polyalgique idiopathique diffus) l'ont identifié comme une véritable maladie en 1997 (AMA, Association Médicale Américaine)
Description
Clinique :
Pour cette description, empruntons justement les termes de l' AMA
:
Le FMS ( Fibro Myalgic
Syndrom ) n'est pas un ensemble "fourre-tout" de symptômes. Le FMS est un état
non dégénératif, non inflammatoire, véritablement systémique, spécifique et
chronique de douleurs, celles-ci étant de type musculaires, diffuses, durables
(au moins trois mois) et non expliquées, toutes les autres causes de myalgies
doivent être exclues: inflammatoires, métaboliques,
toxiques.
Leur intensité est fortement
ressentie par les patients: "C'est bien pire que de simples courbatures !" nous
confie l'une d'elles." Au moins, lorsque l'on souffre de courbatures, on a
souvent une idée de ce qui cause la douleur, alors que
là..,"
Ces douleurs sont aggravées par l'effort, la fatigue, le froid, l'humidité, le stress, les changements de temps, les positions longtemps maintenues. Les signes d'accompagnement sont variés: céphalées, paresthésies, sommeil non réparateur, fatigabilité, troubles digestifs et urinaires, raideur matinale etc.. Les analyses de laboratoire et l'iconographie sont toutes négatives, et permettent seulement d'éliminer d'autres états maladifs. L'autre définition officielle de la fibromyalgie se fonde sur l'identification de "points tendres", dont la description la plus exhaustive est donnée dans le Manuel des Points de Déclenchement (Trigger points) par le médecin personnel de JF Kennedy, le Docteur Janet Travell et son collaborateur le Docteur David Simons. Ce traité est en fait la base de travail des médecins ostéopathes américains, car il ne se limite pas aux quelques points du FMS.
Pour poser le diagnostic de
certitude de fibromyalgie, le Collège de Rhumatologie Américain retient 18
points dont la sensibilité marquée à la palpation digitale doit être retrouvée
pour un minimum de 11 d'entre eux, score qui doit encore être constaté lors de
plusieurs consultations successives.
Ces points sont
:
-Sous occipitaux (à
rapprocher du point d'acupuncture 20 VB)
-Cervicaux bas:
face antérieure des espaces inter transversaires C5/C7 (à rapprocher du 16
IG)
-Trapèzes: au
milieu du bord supérieur ( cf 15 TR )
-Sus épineux: au
dessus de l'épine de l'omoplate, prés de son bord interne( cf 12 IG
)
-Deuxièmes cotes: à
la jonction chondro-costale ,un peu en dehors du bord supérieur ( cf 14 E
)
-Epicondyles (à
rapprocher du 11GI )
-Fessiers: quadrant
supéro-externe de la fesse (cf 54 V) -Grands trochanters: à son bord postérieur
(cf 30 VB) -Genoux: sur le coussinet adipeux de la face interne, au dessous de
l'interligne articulaire ( cf 9 RP )
D'autres signes coexistent
(et non des moindres pour envisager un traitement par
acupuncture):
-les yeux peuvent être trop secs, avec
parfois exagération passagère en sens inverse.
-le système de normalisation thermique
est hors service (ou presque) plus particulièrement en sortant du lit, la
nuit.
Vous pouvez lire la suite de l'article dans la version papier de Méridiens numéro 115
Traduction du Chapitre XV DU
JINGUI YAOLÜE
DE
ZHANG ZHONGJING
par le
Docteur Dea Angelelli
"Attendre
que le mal soit déclaré pour y remédier,
Que le
désordre soit installé pour s'en occuper, C'est attendre d'avoir soif pour
creuser un puits, Attendre le combat pour forger les armes, N'est-ce pas bien
tard ?" SU WEN
Résumé: Le chapitre XV des
"Importantes méthodes du Coffret d'Or" (Jinkui Yaolüe), traité de médecine
rédigé à la fin du 2éme siècle par Zhang Zhong-jing, expose les pouls,
symptômes, traitements phytothérapeutiques et diététiques des ictères,
différenciés selon leur origine en ictère alimentaire, ictère par fatigue
sexuelle, ictère dû à l'alcool, ictère noir ou ictère
chronique
La traduction de ce chapitre
est accompagnée de notes, rédigées à partir de différents commentateurs chinois,
Le but de ces notes est d'éclairer certains points essentiels du texte mais
aussi de montrer la nécessité d'un décryptage averti des textes traditionnels
pour une pratique efficace de la médecine chinoise.
Mots clés: Jinkui Yaolüe, Ictères,
phytothérapie, diététique, prévention
Abstract:
Chapter 15 of the "Important Methods of The Golden Casket" (Jinkui Yaolue), a
medical treatise written at the end of 2nd century A,D, by Zhang Zhong-Jing ,
describes the pulse, symptoms, with phytotherapic and dietetic treatment of
jaundice, classified, according to their origin, as alimentary jaundice,
jaundice from sexual fatigue, jaundice due to alcohol, black jaundice or chronic
jaundice.
The
translation of this chapter has notes written by different Chines commentators.
The object of these notes is not only to elucidate some essential points in the
text but also to demonstrate the need of a careful interpretation of the
traditional texts so as to practise Chinese medicine in an efficient
manner.
Keywords
:
Jinkui Yaolue, jaundice, phytotherapy, dietetic,
prevention.
En tant que médecin
pratiquant l'acupuncture et dans une moindre mesure, la phytothérapie chinoise,
j'ai été amenée à soigner des ictères. Or la médecine chinoise les considère
comme des maladies sui generis. C'est à dire qu'à partir de : voir, écouter,
sentir, palper, la cause est identifiée et le traitement
entrepris.
Nos recherches nous ont
amené à découvrir dans le "Jingui Yaolüe" ou "Importantes méthodes du coffret
d'or" (livre de médecine chinoise de la fin du IIème siècle) un texte traitant
des ictères. A travers les mécanismes physiopathologiques, ce texte décrit
comment différencier les ictères et leurs causes, et comment les
prévenir.
La précision même du texte
permet d'approcher et d'évaluer l'importance du diagnostic énergétique au
travers de l'atteinte des énergies que recouvrent les
ictères.
Dans notre travail, nous
donnons une présentation du chapitre XV du "Jingui Yaolüe" de ZHANG ZHONGJING,
ou "Points Importants du Coffret d'Or". Puis, nous proposons une traduction
personnelle de ce chapitre concernant les ictères. Nous adjoignons des notes
rédigées à partir de différents commentateurs chinois. Ces notes n'ont pas
pour but de faire un commentaire exhaustif du texte. Elles éclairent des
points qui nous paraissent essentiels et sur lesquels nous avons buté. Elles
montrent la nécessité de décrypter les textes traditionnels et de les faire
parler pour pratiquer cette médecine.
Le JINGUI YAOLÜE ou
IMPORTANTES METHODES DU COFFRET D'OR est la deuxième partie du SHANGHAN
ZABING LUN écrit par ZHANG ZHONGJING (150-219) à la fin de la dynastie des Han
orientaux. L'auteur naquit dans le district Nanyang de la province du Henan. Un
petit temple dédié au "Sage de la médecine" fut érigé non loin de sa tombe dans
ce même district.
Le traité original Shanghan zabing lun contenait seize rouleaux: les dix premiers traitaient des maladies fébriles causées par le froid, les six autres traitaient des maladies diverses. L'ouvrage se perdit pendant la période des Trois Royaumes. Wang Shuhe (210-285), auteur du classique des pouls, réorganisa les dix premiers rouleaux à partir de fragments, ce qui donna le Shanghanlun ou traité des atteintes par le froid. Durant le règne de l'empereur Renzong (1023-1063) de la dynastie des Song du Nord un lettré de l'Académie Impériale découvre un résumé du Shanghan zabing lun dans la librairie impériale. Cet abrégé contient trois volumes. Le premier traite des maladies fébriles, le second des maladies diverses et le troisième des maladies gynécologiques. Les deux derniers traités furent réorganisés en un seul qui devint "les importantes méthodes du coffret d'or"
Le livre contient vingt
-cinq chapitres: le chapitre un traite de l'étiologie des maladies, de leur
transmission en plaçant l'homme dans un milieu spatio-temporel dont il ne peut
s'abstraire. Les chapitres deux à vingt-deux traitent de syndromes complexes
comme le diabète, les oedèmes, les maladies gynécologiques, les apoplexies,
les ictères. Les chapitres vingt- trois à vingt- cinq traitent de diététique et
de prescriptions dues à l'expérience.
Comme le Shang
hanlun et le Jingui yaolüe étaient à l'origine un seul livre un
grand nombre de prescriptions se retrouve dans les deux livres. De nombreux
paragraphes du Jingui yaolüe font références au Shanghanlun et présupposent la
connaissance préalable de ce dernier.
Le chapitre XV du Jingui
yaolüe traite des ictères. Il expose les pouls, symptômes, traitements des
ictères d'origines différentes et les différencie en ictère d'origine
alimentaire, ictère par fatigue sexuelle, ictère dû à l'alcool, ictère noir ou
ictère chronique.
Dans un style extrêmement
vivant le texte présente un patient avec ses troubles et les signes cliniques
objectifs pour le médecin, pouls, apparence du malade (voir, écouter, sentir,
palper), l'évolution au cours de la journée et des jours avant que n'apparaisse
l'ictère puis l'ictère une fois déclaré, enfin le traitement et le résultat
devant être obtenu, voire le traitement inapproprié avec analyse de son
pourquoi et de son évolution.
Chemin faisant le texte
décrit les mécanismes de la maladie:
Origine
interne:
-Chaleur
humidité
-froid
humidité
-sécheresse
nouée
Vous pouvez lire la suite de l'article dans la version papier de
Méridiens numéro 115