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Patrick Sautreuil (ASMAF)

Trigger point, métamères et lombalgies.

 

 

Les aiguilles d’acupuncture sont un mode de traitement qui peut s’intégrer aux soins de médecine rééducation dans le traitement des lombalgies ou des lombo-sciatalgies. C’est un outil supplémentaire, différent des traitements médicamenteux ou physiques, apportant des bénéfices spécifiques aux patients. L’implantation profonde, musculaire, des aiguilles nous invite à envisager une responsabilité plus importante de cette structure dans la manifestation de la douleur.

 

Mécanismes d’apparition des douleurs au niveau lombaire

Les discopathies et les hernies discales, la dégénérescence articulaire postérieure arthrosique, la dégradation posturale rachidienne souvent associée, se manifestent par des tableaux douloureux de forme, d’intensité et de topographie différentes selon les patients.

Les formidables progrès de l’imagerie nous aident à mieux comprendre les éléments mécaniques (la compression directe entraîne t-elle une douleur ?), vasculaires (modifications des flux sanguins locaux, en particulier au niveau des vasa nervorum), inflammatoires (front inflammatoire responsable de la douleur sans compression radiculaire) ou de la fibrose post-opératoire qui participent à l’expression de la douleur.

Sur quel versant agissent les aiguilles d’acupuncture ?

 

Trajets radiculalgiques et Méridiens

Classiquement, en médecine occidentale, la douleur de radiculalgie sciatique se différencie en deux principaux trajets :

-       pour la racine L 5, postérieure au niveau de la fesse, postéro-externe de cuisse, latérale externe de jambe, croisant en diagonale le cou de pied pour se terminer au gros orteil ;

-       pour la racine S1, postérieure de la fesse au talon, se prolongeant au bord externe de pied pour se terminer au V° orteil et sous la plante du pied.

 

Ces deux trajets ressemblent à ceux de deux méridiens de MTC. Le trajet de VB s’écarte nettement du trajet de la douleur L5 au niveau du pied, puisqu’il ne se termine sur le IV° orteil et pas sur le gros orteil. Pour le méridien de Vessie, les trajets sont superposables. La distribution hélicoïdale métamérique sensitive confirme la description des patients. La cartographie sensitive tronculaire est plus proche de l’alignement des méridiens.

 

Palpation des points douloureux

La palpation des points des méridiens du membre inférieur d’un sciatalgique par le médecin acupuncteur permet parfois de révéler un territoire douloureux plus vaste que celui connu par un médecin occidental. Une sciatique postérieure comprendra des points douloureux latéraux méconnus du patient, et inversement une sciatique L5 débordera vers l’avant au niveau de la loge antéro-externe (vers le méridien d’Estomac), en arrière (vers le méridien Vessie) ou se terminera autour de F3 (ce qui nous éloigne du trajet de VB).

La palpation des points douloureux a pour but de retrouver la douleur du patient. La puncture pragmatique de ces points et la recherche du deqi retrouve la même sensation douloureuse. Cette sensation particulière est nécessaire, selon notre expérience, pour confirmer l’exactitude de la puncture et garantir l’efficacité du soin.

 

Atteinte musculaire, déficit moteur

La recherche d’un déficit moteur n’est pas systématique. Si une atteinte motrice brutale peut se manifester par un déficit moteur évident pour le patient et le médecin (abolition d’un R.O.T. L4 ou S1, steppage dans l’atteinte L5) une compression chronique d’une racine entraînant une perte de 80 % des moto neurones peut être compensée par le mécanisme d’adoption collatérale. Une cotation à 5/5 peut donc masquer une perte neuronale majeure.

 

Douleur et puncture

En médecine occidentale, la douleur est comprise comme étant liée aux nerfs sensitifs (bien qu’elle ait un trajet descendant, un trajet ascendant évoquant une causalgie). On n’associe pas sciatalgie et douleur d’origine musculaire. Pourtant, une sciatalgie motrice (confirmée par E.M.G.) s’accompagne de douleurs sourdes ou fulgurantes, à types de crampes, de broiements… Des cordons myalgiques sont retrouvés par la palpation dans ces territoires algiques et leur puncture avec des aiguilles d’acupuncture apporte aux patients un important soulagement. On les retrouve dans les sciatiques chroniques. Différents cas cliniques nous ont amené à penser que l’atteinte musculaire était plus fréquente et importante que ce qu’on lui concède habituellement en médecine occidentale.

On apprécie l’évolution de la douleur et/ou de la qualité de vie par l’échelle E.V.A.

 

 Acupuncture pragmatique

Notre pragmatisme acupunctural s’appuie sur des consultations d’acupuncture en Asie, les travaux de Robert Maigne, médecin de médecine physique (Syndrome cellule-périosto-myalgique, souffrance segmentaire rachidienne) complétés par ceux de son fils Jean-Yves, également médecin de médecine physique (dermatome/cellulalgie, myotome/myalgie, sclérotome/douleurs périostées); ceux de Chan Gunn, acupuncteur, pour qui toute douleur périphérique trouve son origine dans une radiculopathie.

Retenons également des travaux de Maigne, le faux lumbago dont l’origine se situe au niveau dorsal inférieur qui est levé par manipulation ou acupuncture ; et les fausses sciatiques dont l’origine est un (ou des) trigger points dans le petit fessier ou le pyramidal.

 

Conclusion

Les aiguilles d’acupuncture peuvent entrer dans la panoplie des soins de médecines physique et s’intégrer aux traitements – médicaments, soins de kinésithérapie et d’ergothérapie, appareillage, gymnastique d’entretien – qui permettent aux patients de retrouver indolence et qualité de vie.

 

 

 

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